Le Palmier

“ Le Palmier ”, éditions Actes Sud, dans la collection “ Le nom de l’arbre ”.(1999).

Je remercie tous ceux qui depuis trente ans m’apportent des informations et des anecdotes sur les palmiers.
Je remercie en particulier, pour leur relecture attentive de ce manuscrit, Catherine Ducatillon de la Villa Thuret, INRA d’Antibes, Ghislain Nicaise de la faculté des Sciences de Nice, Claude Bruno éleveur de palmiers à Hyères-les-Palmiers.

 

Texte reproduit avec l’aimable autorisation des Editions Actes Sud

Chapitre 1 
Pour saluer les palmiers 


“ Ce qui distingue surtout les palmiers, c’est une physionomie et un port majestueux qu’il est difficile de représenter par des paroles... La direction des feuilles est, avec l’axe tracé par leur tige, ce qui contribue le mieux à donner aux palmiers cet air de majesté souveraine...”
                                      Alexander von Humboldt


“Un hymne babylonien chante les trois cent soixante bénéfices que le dattier prête à l’humanité.”
                                      Plutarque 

Le palmier est un extravagant qui nous arrive tout ébouriffé du fond de la préhistoire. Le palmier arrive du sud du Sud. Il porte ses feuilles en  rayons comme le soleil dont il semble être le vert jumeau. On ne peut pas parler du palmier, il faut nécessairement parler des palmiers. Avec près de trois mille espèces, ils représentent un pan entier du monde végétal. Les dattiers, les cocotiers, les rotins, les Phœnix , les Washingtonia, le palmier à sucre et le palmier à huile sont les plus connus. Seulement une petite centaine d'espèces sont acclimatables sur le pourtour méditerranéen, pour leurs qualités ornementales.

Les princes du monde végétal
Avec leurs panaches grandioses, les palmiers sont les nouveaux riches de la botanique occidentale. Lorsque au XVIIIe siècle, le Suédois Carl von Linné s'appliqua à mettre un ordre définitif dans la nomenclature des plantes, il ne sut où les ranger. Tandis que tous les arbres sont des Dicotylédones, les palmiers sont des Monocotylédones. Ce qui fait que ce ne sont pas des arbres malgré leur stature et leur apparence. Ce sont des herbes géantes et leur tronc doit donc littéralement s’appeler un stipe.
Finalement, ému par leur beauté, Linné les plaça en tête de sa nomenclature et les baptisa Principes (1753).
Il faut dire que les palmiers à cette époque étaient pour leurs découvreurs  occidentaux des curiosités au même titre que les lions, les autruches, les éléphants, le tabac et les tomates. Ils arrivaient en désordre dans les bagages des navigateurs et des explorateurs, et l'on ne savait pas trop quoi en faire. Ce n'étaient pas des plantes utiles sous nos latitudes. Catherine de Médicis en avait vu à Hyères en 1564. On ne les distinguait pas alors des cycas, des dracénas, des strélitzias, des pandanus,  des Cyclantacées, avec les feuilles desquelles sont tressés les chapeaux de Panama (Carludovica palmata), et des bananiers.
 Linné répertorie ceux dont il a entendu parler et ils ne sont que quinze, parmi lesquels bien évidemment le dattier. En 1800, le naturaliste allemand Alexandre von Humboldt, au cours de son expédition  à travers le Brésil avec le Français Aimé Bonpland en découvre une quarantaine. En  1823, von Martius avec cinq cents palmiers décrits dans son Historia naturalis universalis  palmarum  se voit décerner le titre de “père des palmiers”. Lequel Martius non seulement jouait du violon mais les fabriquait, et gravait dans leur bois: “Dans les forêts je me suis tu, maintenant que je suis mort je chante.” C’est lui qui disait aussi: “ parmi les palmiers je me sens toujours jeune, parmi les palmiers je ressuscite.”
Aujourd'hui les taxonomistes  recensent plus de deux mille sept cents espèces de palmiers.

Ils arrivent par l’Orient
Les Romains les connaissaient pour les avoir rencontrés dans les territoires de leur empire les plus éloignés de Rome. Ils battaient monnaie à l'effigie du palmier en Judée et César conservait dans son trésor de la poudre de silphium, pour ses vertus prétendues aphrodisiaques. Il s'agissait en fait du coprah du palmier des Seychelles, le Lodoïcea, mais son origine était tenue secrète par les marchands de Zanzibar qui en faisaient le commerce. La seule palmeraie européenne celle d’Elche près de Valence, qui existe encore, avait été plantée par les Arabes.

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